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Cinq jeunes gens se rendent dans le Texas pour y passer les vacances dans une demeure familiale. En recherchant de l'essence pour leur véhicule, ils découvrent une maison à proximité, occupée par un personnage dérangé qui les attaque avec, entre autres, une tronçonneuse...



Tobe Hooper naît en 1943 à Austin, dans le Texas. Ses parents travaillent dans un complexe hôtelier et le laissent régulièrement en garderie dans la salle de cinéma. Il devient un passionné de septième art, s'intéresse notamment aux films de la compagnie Hammer (Le cauchemar de Dracula (1958) de Terence Fisher...), et expérimente abondamment avec la caméra super 8 familiale. Après ses études, il réalise des documentaires et travaille pour la publicité. Il tourne deux longs métrages, avec The heisters (1963) et une oeuvre expérimentale fantastique, Eggshells (1969), en fait une histoire de fantômes. Ce ne sont pas des succès. Hooper assiste à une projection de La nuit des morts-vivants (1968) de George Romero, et, devant les réactions aussi terrifiées qu'enthousiastes, il se dit que, pour percer commercialement, le fantastique est une piste très valable. Les succès de Rosemary's baby (1968) de Roman Polanski et de L'exorciste (1973) de William Friedkin ont du le conforter dans cette idée. Il rassemble alors un petit budget et fait appel à une équipe de débutants, dont l'opérateur Daniel Pearl (L'invasion vient de Mars (1986) de Tobe Hooper, In bed with madonna (1991)...) et le directeur artistique Robert A. Burns (La colline a des yeux (1977) de Wes Craven, Hurlements (1981) de Joe Dante, Re-animator (1985) de Stuart Gordon...). Le tournage ne dure que six semaines, et se déroule dans des conditions très difficiles, notamment à cause des odeurs des abats et des ossements d'animaux abondamment employés dans cette oeuvre. Les acteurs n'ont pas vraiment fait des grandes carrières au cinéma par la suite, bien que certains réapparaissent dans des épisodes de la série des Massacre à la tronçonneuse : Marilyn Burns (Texas chainsaw (1994)...) ; John Siedow (Massacre à la tronçonneuse 2 (1986)...)... Le comédien d'origine islandaise Gunnar Hansen (Mosquito (1995) de Gary Jones...), premier interprète du fameux Leatherface, le tueur à la tronçonneuse, n'a jamais repris ce rôle dans les trois suites, faute d'offres financières suffisamment intéressantes.
Le début des années 1970 est, aux États-Unis, chaotique : Tobe Hooper en parle lui-même comme un moment de désenchantement. Ce pays ne parvient à s'extirper définitivement de la guerre du Vietnam qu'en 1973, tandis que le scandale du Watergate, qui entraîna la démission du président Nixon, a lieu l'année suivante. Les utopies de la fin des années 1960 se sont donc échoués sur une réalité brutale. Jimi Hendrix et Janis Joplin, deux des plus emblématiques vedettes du festival "peace and love" de Woodstock, meurent tragiquement dès 1970, précédé de peu par Brian Jones des The rolling Stones et suivi par Jim Morrison des The doors. Les crimes atroces commis par Charles Manson et sa communauté, se disant inspiré par l'album blanc de The Beatles, achèvent de démolir les dernières illusions hippies. Ce chaos avait déjà été pressenti par George Romero, qui sort en 1968 La nuit des morts-vivants, tourné dans un style documentaire avec très peu de moyens, mais avec une très grande liberté dans la représentation explicite des évènements horrifiques et dans son message politique impitoyable sur la civilisation américaine. Il est suivi, de peu, par les très dérangeant La dernière maison sur la gauche (1972) de Wes Craven, inspiré par La source (1960) d'Ingmar Bergman. Tourné dans des conditions assez semblables à celles de La nuit des morts-vivants, il décrit dans le détail les méfaits d'une bande de psychopathes harcelant deux jeunes adolescentes.

Massacre à la tronçonneuse va s'inspirer de la violence réaliste et insoutenable de ces films, en la rehaussant d'éléments qu'on trouvait dans Deux mille maniaques (1964) de H. G. Lewis et, surtout, dans Délivrance (1972) de John Boorman : des citadins veulent se ressourcer à la campagne, et se heurtent à des indigènes locaux et brutaux qui les persécutent avec une rare cruauté. L'utopie hippie et écologiste du retour à la nature est définitivement morte et enterrée. Pour le personnage de Leatherface, Hooper s'inspire d'Ed Gein, un serial killer du Wisconsin qui viola de nombreuses sépultures afin de se fabriquer des meubles et des masques de femme en peau humaine : il tua aussi au moins quatre femmes, et inspira le personnage de Norman Bates à Alfred Hitchcock pour Psychose (1960), ainsi que le sadique Buffalo Bill dans Le silence des agneaux (1991) de Jonathan Demme. On remarque qu'une tronçonneuse est déjà employée de manière très sanglante au cours de La dernière maison sur la gauche : pourtant Tobe Hooper avoua que l'idée de se servir de cet outil de jardinage comme d'une arme improvisée lui était venue tandis qu'il poireautait dans la queue d'un supermarché, face à un rayon garni de tronçonneuses ! Le masque en peau humaine de Leatherface lui a été inspiré par une histoire que rapporté un médecin, qui avait découpé le visage d'un mort pour en faire un masque d'Halloween. On note au passage que l'usage de peau humaine écorchée, comme costume ou masque, était une tradition guerrière qu'on rencontrait dans la civilisation Aztèque, en Amérique centrale. Dans un message placé au début du métrage, Hooper annonce que Massacre à la tronçonneuse retranscrit fidèlement un vrai fait divers : ce n'est pas exact, mais, pour un spectateur non avertis, les faits, dénués de connotations fantastiques, sont suffisamment vraisemblables pour être crédibles, et cela l'impressionne d'emblée. Ce procédé sera repris par d'autres films, comme Le dernier monde cannibale (1978) de Ruggero Deadato, dans lequel des voyageurs sont massacrés par une tribu primitive : le matériel publicitaire prétendait que ce film était inspiré par une histoire vraie, ce qui était totalement farfelu.

Massacre à la tronçonneuse n'est pas qu'un constat sociologique. C'est aussi un film extrêmement angoissant. En jouant sur la photographie granuleuse et manquant de netteté de la pellicule 16mm, ainsi sur les images oppressantes du cimetière profanée, des éruptions solaires et d'un Texas désolé, Hooper nous plonge dès les premières minutes de son oeuvre dans une ambiance résolument malsaine. L'irruption de l'étrange auto-stoppeur, ses discours sur les différentes manières de tuer les animaux dans les abattoirs, puis sa manière insensée de se taillader la main au couteau, achèvent de mettre le spectateur mal à l'aise. Par contre, l'arrivée des jeunes voyageurs à leur maison donne lieu à des séquences très calmes, au cours desquelles on constate avant tout que la nature texane est loin du paysage idyllique espéré par les jeunes touristes, ou de l'idée grandiose, véhiculée par les westerns, qu'on se fait du Far West : les points d'eau sont asséchés, la maison de famille est une ruine, l'air charrie la puanteur des abattoirs, et un groupe électrogène ronronne en permanence dans le lointain. Tout cela, combiné à l'usage d'une musique purement abstraite et angoissante, à base de grondements, de hurlements et de grincements, achève de préparer le spectateur à une explosion de violence qu'il aura largement anticipée, ne serait-ce que grâce au titre du film !

Les jeunes gens vont donc être massacrés par Leatherface, un garçon apparemment attardé, portant un masque de femme réalisé en peau humaine, s'exprimant avec une voix de fausset et maniant la tronçonneuse comme une arme. Ses agissements cruels ne sont jamais montrés expressément, les coups étant presque toujours donnés hors champs. Mais le travail sur l'atmosphère, la préparation du spectateur, le montage et la bande-son assourdissante (des hurlements répondent au boucan mécanique de la tronçonneuse), sont suffisamment habiles pour que les actes de violence paraissent toujours très choquants. Leatherface s'éloigne du personnage du serial killer traditionnel par le fait qu'il va se révéler entouré d'une famille toute aussi dingue que lui. Ils appartiennent à une ligné d'abatteurs de bestiaux, mis au chômage par la mécanisation croissante des abattoirs industriels. Leur isolement social et géographique les fait se replier sur leur folie, tandis que la viande et la mort restent leur seul environnement. Les membres décédés de la famille sont empaillés, et la demeure est décorée d'œuvres d'art et de meubles macabres bricolés à partir d'ossements et de peaux. Le savoir-faire traditionnel de la famille reste sa raison d'être et la base de l'identité familiale. Leatherface et ses frères semblent être l'ultime dégénérescence des colons ayant peuplé le Texas, l'ultime aboutissement d'une société américaine en pleine décomposition.

La logique de Leatherface et de ses compagnons est donc une logique monstrueuse, dans laquelle la mise à mort est considérée comme un artisanat de prestige, une tradition familiale dont on tire une grande fierté. Surtout, et c'est là que Massacre à la tronçonneuse dérange le plus, ils ne font absolument aucune distinction (à l'exception notable du grand frère, le moins dingue de la bande) entre la viande humaine et la viande animale. Les victimes humaines sont traitées comme des morceaux de barbaque, pendues à des crochets de boucher, stockées dans des glacières, ont la nuque ou le crâne fracassés à coup de masse, avant que leurs carcasses ne soient découpées à la tronçonneuse. La famille des bouchers, poussant leurs raisonnements absurdes et amoraux jusqu'à leurs extrémités, n'éprouveront pas plus de pitié pour les cris de terreur de Sally que pour ceux d'une bête amenée à l'abattoir. En traitant ainsi leurs victimes, en utilisant indifféremment des ossements humains ou animaux pour construire leurs trophées macabres, ils ramènent l'être humain au rang d'un simple morceau de viande, profanant encore, au passage, le caractère sacré des rites funéraires chrétiens traditionnels (ils se servent aussi dans les cimetières). Tobe Hooper, alors végétarien, ne se gène pas pour décrire l'horreur de la viande et la brutalité des traitements subis par les animaux exploités dans les filières alimentaires en les appliquant à des humains. Cette manière de nier la valeur de la personne humaine et de considérer le meurtre comme un travail, accompli selon une méthode rigoureuse et rôdée, renvoie aussi aux camps d'extermination nazis de la seconde guerre mondiale.

Par certains aspects, Massacre à la tronçonneuse est un spectacle tendant vers une distanciation de la violence : l'environnement dans lequel vit cette famille démente est un assemblage surréaliste d'ossements et de trophées morbides ; Leatherface et son frère sont des personnages au comportement et à l'allure burlesque ; certaines séquences de poursuites dans la forêt évoque une version ultra-violente d'un dessin animé de Tom et Jerry... Pourtant, la tension, la violence implacable et insoutenable du film empêchent définitivement le rire de sortir de la gorge du spectateur. L'humour noir ne vient ici que souligner les aspects grotesques et absurdes de la situation vécu par Sally.

Massacre à la tronçonneuse est un film traumatisant, qui pousse jusqu'au bout l'expérience de La dernière maison sur la gauche, en confrontant le spectateur à une restitution réaliste et pénible de la violence, en révélant sans tabou la part profondément barbare contenue en chaque être humain. L'italien Pier Paolo Pasolini poursuivra dans cette voie avec Salo ou les 120 journées de Sodome (1975), une autre oeuvre extrêmement dure. Massacre à la tronçonneuse connaît des problèmes de distribution pendant quelques années aux USA, avant tout à cause d'une mésentente entre Tobe Hooper et ses financiers. Puis, il obtient enfin une large distribution et devient très rapidement une oeuvre-culte réputée. En France, il est montré au Festival de Cannes, dans la section quinzaine des réalisateurs en 1975, et il reçoit un prix à Avoriaz en 1976. La commission de censure se prononce pour une interdiction totale, mais, Françoise Giroud, alors ministre de la Culture, veut que Massacre à la tronçonneuse sorte en salle sans coupure. Pendant ce temps, deux distributeurs différents disent avoir les droits du film pour la France ! La situation juridique finit par se démêler, mais la commission de censure réclame toujours l'interdiction totale, sous prétexte que Massacre à la tronçonneuse serait un film incitant à la violence. Finalement, en été 1981, suite à l'arrivée au pouvoir du parti socialiste, les interdictions d'oeuvres cinématographiques et les coupes dans les films sont levées. Massacre à la tronçonneuse finit par sortir au cinéma en 1982.

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Ed Gein
■ Clint 13/08/2005
MALT est un chef-d'oeuvre malsain et impérissable, son remake tient passablement la route mais souffre d'une définition trop lisse pour réellement retrouver l'ambiance du premier.
Au sujet d'Ed Gein, la goule de Plainfield, un excellent bonus lui est consacré sur l'édition collector du remake. A voir pour saisir le degré de folie de ce type.
La version 2003
■ Vonv 14/03/2004
Malgrés le nom alléchant, ça commence comme un slasher movie avec ados, gros seins, airs crétins... et...

... et ça vire au GORE !!! Et au très bon film d'horreur/angoisse/trash !
J'ai pas encore vu le premier donc j'vuos parlerai pas du scénar.
Les acteurs, dans leurs rôles, sont crédibles. C'est une réserve à Oscars non lus mais on est avec eux dans ce trip sanglant.
L'ambiance : lumières, décors (la maison me fait frissonner rien que d'y penser !), personnages... tout est un régal de gore, d'angoisse, de crétins congénitaux et malsains,...

Les scènes de tronçonneuse et d'étripage sont délicieuses de giclounettes d'hémoglobine, de sueur, de crasse et de vieux crochets rouillés :)

A voir absolument !!!
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