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Un agent immobilier fait visiter à un jeune couple trois charmants petits pavillons dans une banlieue confortable. Mais, à chaque maison est liée une histoire terrible...



Terror tract est en fait un film composé de trois sketchs reliés entre eux par d'excellents petits intermèdes plein d'humour noir. Clint Hutchinson et Lance W. Dreesen se partagent la réalisation de ses segments : ils ont collaboré auparavant uniquement sur des courts-métrages. Ce film a été monté avec très peu de moyens et ne bénéficie donc pas de grandes vedettes dans son casting.

Le genre fantastique s'est toujours bien prêté à une narration très serrée. Ainsi, les plus grands écrivains d'épouvante brillent souvent dans le format de la nouvelle (Lovecraft évidemment, Edgar Poe avec ses Histoires extraordinaires, Jean Ray avec Les nouveaux contes de Canterbury...) qui leur permet d'exploiter leur maîtrise des effets sans se perdre dans une fastidieuse narration. Au cinéma, le format du court ou moyen métrage aura aussi un assez grand succès. Dès l'âge du cinéma expressionniste allemand, on remarque des œuvres qui se divisent en plusieurs sketchs, comme Les trois lumières (1921) de Fritz Lang (la Mort raconte trois histoires à une jeune fille qui vient de perdre son amant) ou Le cabinet des figures de cire (1923) de Paul Leni (un jeune homme invente trois histoires à propos des figures historiques exposé dans un musée de figures de cire). Le format des œuvres de l'âge d'or du cinéma fantastique d'Hollywood étant déjà relativement court (elles duraient en général entre 60 et 70 minutes), cette période sera assez avare en films à sketchs. On note toutefois que le cinéma britannique offrira un chef d'oeuvre du genre avec Au cœur de la nuit (1945), célèbre pour son célèbre segment mettant en scène un ventriloque et sa marionnette étrange.

Au début des années 50, l'éditeur américain E.C. Comics propose des petites BD racontant en quelques pages de courtes histoires d'épouvante : elles vont devenir très populaires (Tales from the crypt, Panic...) et influencer la production à la télévision et au cinéma. On voit alors apparaître des séries TV qui racontent dans chaque épisode des histoires insolites et courtes, indépendantes les unes des autres (Alfred Hitchcock présente à partir de 1955, La quatrième dimension à partir de 1957...). Puis, avec le retour à la mode de l'épouvante traditionnelle grâce au succès des productions britanniques Hammer, le film d'horreur à sketch refait surface au cinéma dans les années 60/70 (Les trois visages de la peur (1963) de Mario Bava en Italie, Contes d'outre-tombe (1972) avec Peter Cushing en Grande-Bretagne, L'empire de la terreur (1962) de Roger Corman aux USA...). Dans les années 80/90, le genre devient plus rare, mais les plus grands auteurs du genre s'y collent néanmoins : George Romero (La nuit des morts-vivants (1968)...) réalise Creepshow (1982) avec des histoires de Stephen King ; John Carpenter (Halloween (1978)...) et Tobe Hooper (Massacre à la tronçonneuse (1974)...) collaborent sur Body bags (1995) pour la télévision ; Dario Argento (Suspiria (1977)...) et Romero proposent Deux yeux maléfiques (1990) d'après les écrits de Poe ; même Lovecraft a le droit à sa petite anthologie cinématographique avec Necronomicon (1995), sur lequel oeuvre, entre autres, Brian Yuzna (Re-animator II (1990)...).

Terror tract s'inscrit donc dans cette longue et noble tradition du film d'épouvante à sketchs, genre qui s'était fait bien rare sur les écrans de cinéma pendant les années 90. Le premier sketch raconte l'histoire d'un trio amoureux horrifique : un mari très jaloux surprend sa femme avec son amant, et il veut les tuer... On apprécie immédiatement la simplicité de la narration et l'efficacité de la réalisation. Les rebondissements sont suffisamment rapides et forts pour ne pas laisser au spectateur le temps de s'ennuyer un instant. Enfin, Terror tract ne lésine pas ici sur le gore et sur une violence impressionnante, dont on pensait que les recettes s'étaient perdues aux États-Unis avec des œuvres comme Seven (1994) de David Fincher (tout se passe hors-champ) et Scream (1996) de Wes Craven (assez soft).

Le second sketch rappelle beaucoup Incident de parcours (1988) de George Romero : une fillette découvre un petit singe dans un jardin et veut l'adopter. Ses parents acceptent, mais rapidement, le petit animal devient très agressif. Là aussi, on apprécie la densité de l'intrigue et le rythme nerveux de l'ensemble.

Enfin le troisième sketch sacrifie à la mode du slasher qui sévit depuis Scream (1996), en y mettant quelques éléments rappelant le thriller Les yeux de Laura Mars (1978) d'Irvin Kershner. Un tueur de femmes portant un masque de grand-mère sévit dans une ville : un jeune homme prétend qu'il a le pouvoir de voir les meurtres au moment où ils sont commis. Pourtant, ce segment est beaucoup plus méchant que les œuvres insipides s'inscrivant dans le courant des néo-slashers : les meurtres y sont sanglants et cruels, et l'ambiance y est d'une terrible noirceur.

Certes, Terror tract manque trop d'originalité pour vraiment surprendre. Le second segment est peut-être un brin trop long, et le spectateur peut s'ennuyer un peu devant cette anthologie. Pourtant, la réalisation classique et solide, la méchanceté hargneuse des histoires et l'humour noir très réussi des transitions font mouche. Terror tract est vraiment une agréable surprise.

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