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Will Graham, un agent du FBI spécialisé dans la traque des serial killer, tente de mettre la main sur un tueur qui a massacré deux familles...



Avec La forteresse noire (1983), le réalisateur Michael Mann donnait sa versiontrès stylisée et ambitieuse du mythe de Dracula. Mais le tournage a été perturbé parle décès de Wally Veevers, responsable de ses effets visuels. A sa sortie, le film n'estpas un succès. Mann rebondit rapidement en collaborant à l'élaboration de Deuxflics à Miami, une des séries télévisées les plus populaires des années 1980.On le retrouve à la réalisation d'un long métrage avec Le sixième sens, quiest en fait l'adaptation du roman Le dragon rouge, premier livre, publié en1983, de la fameuse trilogie rédigée par Thomas Harris, dédiée aux serial killers :les deux suivants seront Le silence des agneaux (adapté au cinéma avec unénorme succès en 1989 par Jonathan Demme) et Hannibal (porté à l'écran parRidley Scott en 2001). Tous ces romans ont la particularité de mettre en scène le tueurcannibale Hannibal Lecter, appelé à devenir, suite au triomphe du film Le silencedes agneaux, une figure mythique du cinéma d'épouvante. C'est Mann lui-même qui aeu l'idée, dès 1983, d'adapter Le dragon rouge. Le rôle de l'enquêteur WillGraham est tenu par l'excellent William L. Petersen : apparu pour la première fois aucinéma dans Le solitaire (1981) (premier film pour le grand écran de MichaelMann), on le retrouve en tête de distribution de Police fédérale, Los Angeles(1985), le superbe polar schizophrène de William Friedkin ; mais Police fédérale,Los Angeles et Le sixième sens seront des échecs commerciaux, et cetacteur se retrouvera injustement relégué dans des seconds rôles (les thrillers Fear(1996), The skulls (2000)...). Son épouse est interprétée par Kim Greist,qu'on venait de découvrir dans Brazil (1985) de Terry Gilliam. Hannibal"Lecktor", comme il est appelé dans ce film, est ici incarné par le comédienBrian Cox (Braveheart (1995) de Mel Gibson, Au revoir à jamais (1996)de Renny Harlyn, Le cercle (2002) de Gore Verbinski...).
Will Graham est un ancien agent du FBI qui s'est retiré de son poste suite à la trèséprouvante traque qu'il a mené afin de capturer le tueur sanguinaire Hannibal Lecktor.Pourtant, une nouvelle affaire de serial killer répand la terreur aux États-unis : deuxfamilles ont été massacrées, apparemment par un dangereux psychopathe. Le FBI faitalors appel à son ancien limier. Will, malgré les réticences de son entourage, acceptede prendre cette affaire en charge. Mais sa façon de faire est très particulière :plutôt que de privilégier le recoupement d'indices matériels, il favorise une méthodeconsistant à tenter d'étudier minutieusement le fonctionnement de l'esprit du tueurqu'il pourchasse, afin de pouvoir anticiper ses réactions. Pour efficace qu'il soit, ceprocédé a l'inconvénient d'être extrêmement dangereux pour la santé mentale dupolicier, forcé d'explorer les méandres ténébreuses d'esprits malades. Le personnaged'Hannibal, rendu si populaire par Le silence des agneaux ne tient ici qu'unrôle relativement secondaire : prétextant qu'il cherche des informations, Will va allerrendre visite à son ennemi juré, désormais captif dans un établissement de très hautesécurité, afin de reprendre contact avec l'univers dément des serial killer. MaisHannibal comprend bien la manœuvre et va profiter de cette opportunité pour tenterde se venger de Will...


On peut considérer que Le sixième sens se partage en deux parties asseznettement distinctes. La première heure se présente comme une enquête asseztraditionnelle. La personnalité du tueur nous est révélée par petites touches, enfonction des informations et des déductions que le FBI réunit laborieusement. Cemaniaque, le "Dragon Rouge" comme il s'appelle lui-même en référence à unetoile symboliste de William Blake, nous apparaît tel un personnage abstrait etinquiétant, tandis que la personnalité et la méthode de Will Graham nous sont décritesavec une très grande minutie. Le procédé de ce policier, qui consiste à tenter decomprendre le fonctionnement mental du tueur dément qu'il traque, le force à se mettretrès gravement en danger. Forcé de s'impliquer complètement dans ce processus risqué(qui l'a déjà mener à passer un séjour en clinique psychiatrique après la traqued'Hannibal), il se détache de sa famille. Pourtant, ce n'est pas par perversité ou goûtdu macabre qu'il se lance dans ce voyage au bout des ténèbres, mais bien pour protégerdes familles de la folie meurtrière du Dragon Rouge. William L. Petersen interprète defaçon époustouflante ce policier touchant et fragile, écrasé par la terribleresponsabilité qui lui incombe, lui, le "meilleur" chasseur de serial-killer duFBI.


La seconde partie du métrage va renverser la perspective. Ce n'est plus le point de vuede l'agent du FBI qu'on va accompagner, mais celui de Dragon Rouge, Francis Dolarhyde deson vrai nom. Toutefois, la césure dans la structure du film n'a rien d'arbitraire : sion passe du policier au tueur, c'est en partie parce que Graham commence à appréhenderavec précision le fonctionnement de l'esprit de Dolarhyde. La folie de ce serial killertrouve ses origines dans les comportements sociaux inadmissibles et violents auxquels il aété exposé dans son enfance : battu par des membres de sa famille, son attitude trahiune soif de reconnaissance et d'attention. Le masque du théâtrale et grandiloquent"Dragon Rouge" cache en fait un homme blessé, infantile, hantée par l'imageuniverselle d'un bonheur familial qui lui a été injustement confisqué. Le sixièmesens semble même lui offrir une chance de rédemption, au cours de la très bellerencontre avec l'aveugle, qui saura, un temps, dompté ce fauve. Pourtant, la suite desévènements laisse entendre que lorsqu'un homme est démoli, détruit, au point dedevenir un très dangereux psychopathe, il n'est plus récupérable. Ainsi, Lesixième sens porte, sur le thème du serial-killer, un regard humain, sensible,d'une subtilité qui nous entraîne bien loin de l'approche grossière et manichéenned'un Seven (1995) ou même de Le silence des agneaux.


Le sixième sens, c'est encore une mise en image souvent somptueuse et d'unegrande richesse. Contrairement au parti-pris réaliste de Jonathan Demme pour Lesilence des agneaux, Mann opte pour une stylisation, qui a parfois été jugéeoutrancière. Ainsi, comme Fritz Lang (Metropolis (1927)...) ou Dario Argento (Inferno(1980)...), Mann noue dans son travail des liens étroits entre l'architecture et lecinéma. Par exemple, il est peu vraisemblable que l'asile où on enferme un criminelcomme Hannibal soit un aussi superbe bâtiment que elui qu'on voit dans Le sixièmesens. De même, la villa du "Dragon Rouge" est une très belle demeured'architecte... ce qui n'est pas très vraisemblable ! Le tout est encore mis en valeurpar la très belle photographie de l'italien Dante Spinotti, dont c'était la premièreparticipation à un long métrage américain : depuis, il a travaillé sur tous les filmsréalisés par Michael Mann jusqu'à Révélations (1999).


La mise en scène de Le sixième sens va très habilement se construire autourd'un univers purement visuel : cela se justifie tout à fait, étant donné que"Dragon Rouge" est obsédé par les images, notamment par les films familiauxprésentant des familles unies, heureuses et épanouies. Le regard est en effet un enjeufondamental : on devine Dolarhyde traumatisé par le regard qu'on porte sur lui, aussibien que par le regard qu'il porte sur lui-même. On ne s'étonne pas, dès lors, que legrain de sable qui fera gripper cette machine à tuer sera une femme aveugle. Dans lesrapports qu'il entretiendra avec elle, le regard et de l'image sociale n'auront plus leursplace. Toujours dans ce jeu sur le regard et les images, Mann décrit avec une grandeminutie, lors de l'étude par le FBI du message envoyé par "Dragon Rouge" àLecktor, les moyens d'étude scientifique d'un indice, qui consiste à révéler leséléments cachés derrière la surface apparente des choses à l'aide de moyenstechnologiques tels que les rayons infra-rouges.


Certes, on pourra objecter que le film souffre parfois de légers moments de statisme etde petites longueurs. De même, on peut trouver certains éléments du commentairemusicale assez médiocres et déplacées (notamment les chansons, qui affaiblissentparfois les passages qu'elles sont censées illustrées). Il n'en reste pas moins que Lesixième sens est un thriller de grande classe. On apprécie particulièrement lasubtilité avec lequel il approche le thème des serial killer, traité d'habitude avecplus de balourdise. Quoi qu'il en soit, Le sixième sens a été à sa sortie unéchec commercial, bien qu'il ait reçu en France un prix au Festival du film policier deCognac. Mann se consacrera essentiellement à la télévision jusqu'au début des années1990 où il fait son grand retour avec une adaptation de Le dernier des Mohicans(1992), suivi des thrillers Heat (1995) et Révélations  (1999)qui lui valent enfin une grande estime critique. Son dernier film en date est Ali,biographie filmée du célèbre boxeur américain Mohamed Ali. Suite aux succès de Lesilence des agneaux et Hannibal, Brett Ratner réalisera une nouvelleadaptation du même roman avec Dragon rouge (2002), dans lequel, cette fois,Hannibal Lecter est interprété par Anthony Hopkins.


Bibliographie consultée :

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Dur dur d'être un poulet
■ Vonv 02/02/2004
J'ai vu ce film à la TV par hasard, un soir où il passait en deuxième partie de soirée sur TF1... genre je m'attendais à un Steven Seagal-like et là... - PAF - la baffe.

Héros tourmenté et interprété de façon excellentissime, histoire qui se tient très bien, réalisation qui fait monter la tension et surtout qui nous fait sombrer avec le détective dans une descente aux enfers pour un but honorable... mais sortira-t-il de cette spirale psychologique à temps ???
Bien meilleur que les séquelles...
■ Fab 21/08/2003
Si il y a bien un film à voir dans la série "silence des Agneaux", c'est bien celui-là : pour son approche originale des serial-killers (prononcez "céréales-killeuuuurs" ;-)) ), sans le manichéisme habituel. Le film n'est également pas centré sur notre cher ami cannibale, ce qui est, à mon avis, une bonne chose (pas comme dans les séquelles...).Si l'on ajoute à cela une très bonne réalisation (la fin est excellente), alors vous obtenez un l'un des meilleurs films policiers de ces 20 dernières années...

A noter aussi quelques bonnes séquences d'analyses d'indices, ce qui était (il me semble) assez original à l'époque (je ne vois pas pourquoi je dis ça, mais j'avais envie... ;-) )
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Merci à Monsieur Sandy Petersen !
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