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Deux jeunes filles, Phyllis et Mari, veulent aller voir un concert de rock. En cherchant à acheter de l'herbe dans un quartier sordide, elles se font kidnapper par des maniaques...



La dernière maison sur la gauche est la seconde réalisation de Wes Craven (Les griffes de la nuit (1985), Scream (1996)...), et son premier film d'horreur. Diplômé en lettres et en philosophie, il travaillait au départ essentiellement dans le domaine de la post-production. Puis, il réalisa ce film, produit par son ami Sean S. Cunningham, qui deviendra lui aussi célèbre en dirigeant le premier Vendredi 13 (1980). Il s'agit en fait d'une œuvre à très petit budget, filmée dans un style proche du documentaire. Ainsi, les acteurs étaient essentiellement des amateurs. Pourtant, David Hess jouera ensuite dans des films d'horreur (La maison au fond du parc (1980) de Ruggero Deodato, La créature du marais (1982) de Wes Craven...) et Fred Lincoln, qui tient ici le rôle d'un obsédé sexuel, deviendra un réalisateur de porno très productif !
En 1972, la violence au cinéma avait récemment gagné en intensité sur les écrans des Etats Unis, avec des films comme La nuit des mort-vivants (1968) de George Romero ou La horde sauvage (1969) de Sam Peckinpah. Mais cette violence était avant tout le reflet de la société américaine de cette époque. D'une part, le mouvement utopiste Flower Power de la fin des années 1960 avait fini par dégénérer, avec les morts tragiques de musiciens emblématiques (Jimi Hendrix, Brian Jones des Rolling Stones...) ou le massacre de l'actrice Sharon Tate par la bande de Charles Manson. Surtout, l'enlisement sanglant de la guerre du Vietnam pesait lourd sur les consciences. C'est ainsi que Craven disait vouloir faire un film qui montrerait en détails, ce qu'est la vraie violence telle qu'elle s'exprime dans les faits divers ou pendant les guerres. La dernière maison sur la gauche décrit donc le calvaire de deux jeunes filles persécutées par des brutes et des obsédés sexuels, qui abusent d'elles pour se distraire. Ce cinéma du sadisme sans concession rend le spectateur témoin d'exactions particulièrement innommables et déplaisantes. Il s'inscrit dans la tradition d'oeuvres très dures, telles qu'Orange mécanique (1971) de Stanley Kubrick, Henry, portrait of a serial killer (1986) de John McNaughton, Funny games (1997) de Michael Hanneke ou Salo ou les 120 journées de Sodome (1975) de Pier Paolo Pasolini. Ce film fut évidemment un scandale, et sa version intégrale reste encore interdite aujourd'hui dans plusieurs pays.

Dans La dernière maison sur la gauche, les bourreaux sont des détraqués, complètement dépourvus de sens moral ou de compassion. Craven les présente d'ailleurs assez souvent comme des espèces de clowns répugnants, à la fois ridicules et terriblement dangereux. Les souffrances qu'ils vont faire endurer à Phyllis et Mari sont gratuites, sans autre enjeu que l'"amusement", le plaisir d'humilier et de faire souffrir. Pour réaliser leurs crimes, ils se rendent dans un coin de campagne isolé et sauvage. Ils vont leur infliger des tortures sexuelles (viol...), physiques (blessure au couteau...) ou morales (humiliation). Pourtant, pendant un instant, les sadiques vont prendre conscience de la barbarie de leurs actes (après le calvaire de la jeune Mari), et, parmi eux, le jeune junkie restera à l'écart de ces jeux cruels qui le dégoûtent profondément.

La seconde partie de La dernière maison sur la gauche est consacrée à la vengeance des parents d'une des jeunes filles. Emportés dans un inexorable engrenage de l'horreur, ils se livreront eux-mêmes à des sévices que ne renieraient pas les sadiques eux-mêmes (castration, électrocution...). Cela semble annoncer tout un cinéma de la vengeance privée et de l'auto-défense brutale qui apparaîtra avec Mad Max (1979) de George Miller, Le vieux fusil (1975) de Robert Enrico ou, surtout, Un justicier dans la ville (1975) avec Charles Bronson.

Dans La dernière maison sur la gauche, la violence est montrée d'une façon extrêmement crue. Pourtant, Craven la présente d'une manière très originale, qui tend à la dédramatiser. Les séquences de sévices sont montés en alternance avec des scènes très anodines, comme les aventures de deux policiers débiles ou la préparation d'une fête, ce qui tend à désamorcer la tension des passages les plus insupportables. De même, la musique cherche rarement à provoquer une sensation de malaise ou de tristesse: au contraire, ses airs de country à la Shérif, fais moi peur ou son rock progressif archi-démodé installent une distance entre le spectateur et les horreurs qui se déroulent sur l'écran. Craven refuse encore d'utiliser l'effet choquant produit par ce spectacle de violence afin de faire du terrorisme intellectuel et accuser des responsables (comme Hanneke, dans Funny games, qui s'en prend violemment aux médias ; ou Pasolini avec Salo ou les 120 journées de Sodome, qui critique à la fois le fascisme et les intellectuels bourgeois). Il refuse même de poser les termes d'un débat moral, comme le fait Kubrick dans Orange mécanique, en mettant en balance une permissivité excessive d'une part et une répression inhumaine d'autre part. Non, Craven se contente de proposer honnêtement la vision de cette violence réaliste, et laisse au spectateur la liberté de réfléchir par lui-même sur ce qu'il voit. On note encore un final étrange, au cours duquel tous les protagonistes du drame, bourreaux et victimes, nous sont présentés à égalité, riant et joyeux, magnifiés par des arrêts sur image : cela rappelle le défilé héroïque des cow-boys fous de violence à la fin de La horde sauvage. Encore une fois, Craven refuse de prendre partie, de dire ce qui est bien ou mal : c'est au spectateur de décider comment il veut réagir face à ses personnages.

La dernière maison sur la gauche est donc très dur et on le déconseillera vivement aux personnes sensibles. Par moment, on regrette la réalisation très brouillonne et l'interprétation parfois inadéquate. Néanmoins, ce film reste une œuvre intelligente et importante, qui présente un regard original sur la violence au cinéma.

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Old school
■ Edelweiss 18/10/2003
La dernière maison sur la gauche est emblématique de la grande période du film d'horreur américain. La réalisation est impeccable, les personnages ont une réelle profondeur. On est loin du stab movie pour adolescent que pourra réaliser le même Craven plus tard. Il nous rappelle également que ce dernier, à une époque maintenant révolue, a été un grand réalisateur.
C'est du cinéma engagé qui a du sens, c'est suffisamment rare aujourd'hui pour être souligné. A voir donc.
Edelweiss.
Massacre à l'Orange du Shériff
■ Vonv 17/10/2003
Ben vi, ce film, c'est un mix de Massacre à la tronçonneuse, Orange Mécanique et Shériff fait moi peur.

C'est froide, bien violent, réaliste et psychologiquement bien chaud. Les scènes sanglantes sont filmées sans fioritures. Les acteurs donnent l'impression d'être des gens réels.

Mais bien que ça dérange, ça a pas vraiment pris avec moi. Je sais pas. J'avais pas aimé Orange Mécanique et là non plus j'ai pas du tout accroché...

A ne conseiller qu'à un public averti !
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