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Max Cady, un violeur, sort de prison après quatorze ans de détention. Il est bien décidé à se venger de son avocat, Bowden, car il considère que celui-ci ne l'a pas bien défendu lors de son procès... Bowden vit tranquillement dans une petite ville avec sa fille et son épouse.



Les nerfs à vif de Martin Scorsese est le remake d'un thriller du même nom de1962, réalisé par Jack Lee Thompson et interprété alors par Robert Mitchum (dans lerôle de Cady) et Gregory Peck (dans celui de Bowden). Ces deux acteurs apparaissentd'ailleurs dans des rôles secondaires pour cette nouvelle version. C'est Steven Spielbergqui a l'idée de ce remake. Il en fait rédiger un scénario par Wesley Strick, puis ilsont l'idée de proposer le rôle de Max Cady à Robert de Niro (Taxi driver(1976) de Scorsese...). De Niro accepte, et, avec Spielberg, ils décident d'en confier laréalisation à Scorsese. Celui-ci venait alors de connaître un éclatant succèscritique et public avec le film de gangsters Les affranchis (1990),réussite bienvenue après l'accueil mitigé réservé à son La dernière tentationdu Christ (1989). Scorsese émet des réserves : l'exercice du remake ne lui plaîtguère, et il juge le scénario rédigé par Wesley Strick (qui avait fait un script dansun esprit plutôt "spielbergien") sans intérêt. Scorsese et Strick seremettent alors au travail pour obtenir un scénario plus en phase avec lespréoccupations du réalisateur de Taxi driver. Produit par Universal, avecl'aide d'Amblin, la firme de Spielberg, Les nerfs à vif bénéficie d'un budgetélevé, de 35 millions de dollars, ce qui en fait la plus grosse production réaliséepar Scorsese depuis l'époque de New York, New York (1977) et Raging bull(1980). Il s'entoure de techniciens renommés, comme le chef-opérateur Freddie Francis (Lesinnocents (1961) de Jack Clayton, Elephant man (1980) de David Lynch...), etré-utilise la musique qu'avait composée par Bernard Herrmann (Psychose(1960)...) pour la première version de Les nerfs à vif, en la faisant réorchestrerpar Elmer Bernstein. Aux côtés de De Niro, Nick Nolte (48 heures (1982) deWalter Hill, Under fire (1983) de Roger Spottiswoode...) incarne l'avocat SamuelBowden ; Jessica Lange (King Kong (1976) de Guillermin, Le facteur sonnetoujours deux fois (1981)...) interprète sa femme, et Juliette Lewis (alors âgéede dix-huit ans) (Tueurs nés (1994) d'Oliver Stone, Une nuit en enfer(1996) de Robert Rodriguez...) est sa fille.
Max Cody sort de prison après quatorze années de détention, purgées pour avoirtabassé et violé une jeune femme. Illettré au moment de son arrestation, il a eu letemps, en prison, de se cultiver et de lire beaucoup, notamment des ouvrages de droit. Ila ainsi pris en main sa propre défense et s'est rendu compte que l'avocat qui l'adéfendu au cours de son premier procès, Sam Bowden, avait délibérément caché undossier concernant la moralité "douteuse" de la victime. Or cette pièce auraitsans doute éviter à Cody d'aller en prison. Il décide donc de se rendre dans la petiteville où Bowden vit avec sa femme et sa fille de quinze ans. Il commence à les harceler,notamment en empoisonnant leur chien. Bowden engage un détective privé pour que celui-cisurveille Cady... Les nerfs à vif propose donc a priori une scénario dethriller très classique, dans lequel des personnes "gentilles" en position defaiblesse vont être harcelées par un personnage violent, voire psychopathe. Cettesituation engendre alors une progression de la tension psychologique et du dangerphysique. On pense à Key Largo (1948) de John Huston, La maison des otages(1955) de William Wyler, Seule dans la nuit (1967) de Terence Young ou le récentPanic room (2002) de David Fincher...


Toutefois, Scorsese brouille un peu les cartes. La vie de Sam Bowden, sous une apparencebien tranquille, n'est pas dénuée d'aspérités. Différentes étapes de la crise de sonménage, essentiellement due à ses infidélités, nous sont révélées. De même, sonépouse Leigh a traversé des périodes de dépression, et vit toujours assez mal sa viede femme au foyer. Quand à leur fille Danielle, elle a été l'objet d'un petit scandaleà son lycée, après avoir été attrapée en train de fumer un joint. Lorsque Bowdentente de protéger sa famille contre Cody, il va aussi faire preuve de maladresses, enprenant parfois des décisions sur un coup de tête (lorsqu'il confie au détective privéle soin d'embaucher des hommes pour tabasser Cody), en se montrant trop bavard, ou enfaisant preuve d'une certaine lâcheté. D'ailleurs, du simple point de vue de ladéontologie professionnelle, il s'est certainement montré fautif lors du procès duvioleur : il a sciemment dissimulé des pièces qui auraient sans doute mené àl'acquittement de Cody. Mais, refusant de laisser un pareil maniaque dans la nature, ilest allé à l'encontre des intérêts de son client. Par conséquent, Bowden doute etsait bien que, d'une certaine façon, il est fautif.


Cody, de son côté, a étudié des livres de droit pénal au cours de sa détention. Ilsait parfaitement que Bowden est dans son tort. Dès lors, se sachant dans son bon droit,sa détermination n'en est que plus forte. Psychopathe exalté, la lecture de la Bible l'aaussi convaincu qu'il est un espèce d'ange exterminateur, qui doit faire payer à Bowdenson "crime". Plutôt que d'avoir recours à des moyens légaux, il va prendrelui-même en main sa vengeance, préparant son corps et son esprit à devenir des armes auservice de sa croisade implacable. Il est ainsi doué d'une force physique spectaculaire(lorsqu'il tabasse les trois hommes de main chargés de lui casser la figure...) et d'unevolonté de fer, aiguisée au cours de sa longue période d'emprisonnement. Dès lors, lecombat paraît inégal entre la famille Bowden, minée par les doutes et les crises, etl'implacable Cody.


Ayant ainsi tenté de donner un peu d'épaisseur à un scénario assez quelconque,Scorsese va aussi proposer une réalisation très virtuose et nerveuse, notamment àl'aide de cadrages serrés (on note que c'est la première fois que Scorsese utilisait unvrai format scope, avec lentilles anamorphiques), un montage nerveux et des mouvements decaméras rapides (brusques travellings avants, violents panoramiques...). La mise en avantde l'excellente musique de Herrmann participe aussi du style de ce film qui n'adéfinitivement pas peur d'"en faire trop". Scorsese a pourtant avoué plus tardque Les nerfs à vif ne lui avait pas paru une très bonne expérience. Contraintd'oeuvrer dans un genre qui lui était étranger (le thriller), il devait tenterd'élaborer des séquences avec une progression précise et solide du suspens, ce qui secombine en fait plutôt difficilement avec son style flamboyant, chaotique et lyrique. Ledénouement, à bord du bateau pris dans la tempête, est assez représentatif de cettesituation. La réalisation de Scorsese fait parfois de ce passage un impressionnant chaos,réalisé avec un certain génie, mais la banalité du script, qui accumule clichés etbanalités (le "retour" de Cody), ainsi que certaines idées maladroites (Codyfaisant le procès de Bowden, avec une réalisation assez grotesque) tirent l'ensemblevers le bas. Il faut encore noter que De Niro semble avoir été laissé un peu trop enroue libre. Il donne l'impression de se parodier (lorsqu'il se déguise en femme parexemple, ce qui était d'ailleurs une idée de Spielberg), sans réussir à vraimenttransmettre une impression de danger ou à donner une de la profondeur à son personnage.


Les nerfs à vif est certes un film intéressant, bénéficiant d'uneréalisation très au dessus de la moyenne et d'un script cherchant (pas toujours avecbeaucoup de réussite) à sortir des ornières d'un genre très balisé. Pourtant,Scorsese peine à installer à un vrai suspens, et on se dit que, mieux maîtrisé, avecun Cody moins cabotin, il aurait pu s'agir d'une grande réussite. Les nerfs à vif allaitconnaître un gros succès commercial. Scorsese a ensuite toute liberté pour réaliserson projet suivant : le coûteux film en costume L'âge de l'innocence (1993)dans lequel il affirme son goût pour les grandes épopées Hollywoodiennes, mais quirecueille un accueil mitigé. Il réalise ensuite Casino (1995), a priori plusrassurant pour Universal puisque assez proche de Les affranchis. Mais ce seraencore un échec commercial (comme Kundun (1997) et le pourtant peu onéreux Atombeau ouvert (1999)). Avec Gangs of New York (2002), il réalise unefresque historique explorant les racines du gangstérisme américain, mais l'accueilpublic sera assez réservé, en tout cas aux USA.


Bibliographie consultée :

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